[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]TOUSSAINT - Certains cimetières sont de vrais ilots de verdure en
ville, comme celui du Père Lachaise, à Paris, où les arbres et les
animaux ont élu domicile...
C’est le plus grand espace vert de
Paris intra-muros: le cimetière du Père Lachaise, surtout connu pour ses
morts célèbres comme Jim Morrison, Marcel Proust ou Oscar Wilde, est
aussi une immense réserve de biodiversité en pleine ville. Les arbres
qui font le charme des lieux ont pris le dessus sur les plus vieilles
tombes, ont envahi les interstices dans les murailles et ont poussé sur
tous les recoins de terre
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Fouines, renards, essaims d’abeilles…«Ce cimetière a longtemps été entretenu rigoureusement car il
accueille beaucoup de public, explique Claude Frison, chargée du
patrimoine naturel à l’Agence d’écologie urbaine. Depuis que nous avons
arrêté le désherbant, les petites herbes repoussent, les insectes
reviennent et avec eux les oiseaux.» Un inventaire de la faune et de la
flore du cimetière a ainsi dénombré plus de 400 espèces de plantes
sauvages et plus de 40 espèces d’oiseaux, dont des chouettes hulottes,
des faucons crécerelles, des éperviers,… «Nous avons deux espèces
végétales protégées au Père Lachaise: la
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En se promenant parmi les tombes la nuit, on risque plus de croiser
des pipistrelles, des hérissons ou des fouines que des fantômes,
assure-t-elle. Arrivés spontanément grâce à la reconstitution de
l’écosystème, les animaux ont peuplé le cimetière, rejoignant la
population de chats errants qui y a élu domicile. Au cimetière de
Thiais, en banlieue parisienne, on a même vu des renards, bien acceptés
par la population asiatique qui y voit un symbole de protection divine
des lieux. Au Père Lachaise, c’est un essaim d’abeilles qui avait
trouvé refuge dans l’oreille de la statue de Casimir Périer.
Laisser la vie renaître sur les tombes des êtres disparusDans les murs et les pierres du Père Lachaise, les espèces rupestres
se plaisent: fougères, araignées ou oiseaux nicheurs tels que la mésange
charbonnière côtoient des arbres plus surprenants. «Nous avons deux
néfliers du Japon, des sureaux, des roses trémières», observe Claude
Frison. Les fleurs d’ornement se sont souvent naturalisées: «Les plantes
en jardinière se ressèment un peu plus loin. La lavande et la mélisse,
par exemple, se disséminent bien, poursuit Claude Frison. Mais on se
méfie des espèces invasives, comme l’érable sycomore.»
L’entretien des cimetières est un exercice délicat. En choisissant le
«zéro phytosanitaire», la mairie de Paris a donné la priorité à la
biodiversité mais a compliqué la tâche des quelque 500 agents
d’entretien. «Il faut désherber manuellement et choisir les espèces que
l’on enlève, explique Claude Frison. Il faut aussi que le public
s’habitue à voir des herbes sur les tombes.» Par peur de faire «négligé»
ou parce que les pompes funèbres ne laissent pas vraiment le choix aux
familles, les tombes en pleine terre ou surmontées d’un petit jardin
sont rares sorti du coin «romantique» du Père Lachaise et sur les dalles
de marbre brillant, c’est au karcher et à l’eau de Javel qu’on élimine
la moindre mousse. Une catastrophe pour la vie des sols, et au-delà pour
l’environnement de toute la ville: «Un cimetière arboré a un effet
climatique car il réduit la chaleur en ville», explique la spécialiste.
Laisser la vie renaître sur les souvenirs des êtres disparus serait plus
qu’un symbole: ce serait aussi un geste pour l’avenir.
Audrey Chauvet